C’est drôlement bien le 1e mai. Jour chômé, on glande. S’il fait beau on se fait le défilé, sinon on se défile et on passe la journée au bistro avec les copains. Mais s’il fait beau et qu’on défile, ça n’est pas pour ça qu’on ne file pas au bistro dès la manifestation terminée. Je veux dire sitôt (et parfois un peu trop tôt) que les céhèresses ont dispersé la manif pour nous éviter de choper un coup de soleil. Si un brin de jolie fille vend du muguet, je lui en achète. Je cours chez moi en rapporter à ma chérie.
Oh du muguet, qu’elle dit en faisant semblant d’être surprise. Tu parles! pas une seule fois où j’ai oublié, même que j’en prends aussi pour la belle-mère, que je me demande pourquoi.
T’as rien grignoté, qu’elle me dit à midi, ma chérie. Pas l’temps, que je réponds en gribouillant vite fait «Mort aux vaches» sur une vieille taie de traversin qui fera l’affaire. Y’a de l’huile sur le feu à la manif. Les CRS. Faut que j’y retourne avec les camarades. Tu comprends…
Ça klaxonne. Le Mimile et le Jojo m’attendent en bas. Un bisou, et hop! les escaliers dévalés vite fait bien fait, direction la petite vendeuse de muguet. Mimi comme elle est, son stock de muguet a fondu. Pas un copain qui n’en ait accroché un brin au revers de la veste.
La Fédé a prévu un petit bal.
Aux infos, ils ont montré la manif.
Les enfants, v’nez voir papa. J’ai dit à ma petite famille que la télé était venue.
«Papa, c’est papa!» qu’ils ont hurlé en me reconnaissant, mais c’était pas moi. Ce que je ne leur ai pas dit.
Après, c’était bientôt plus le 1er mai et on est allé se coucher.
Le lendemain, dimanche. Du coup on s’est fait de gros câlins ma môme et moi.