J’ai pris la route, l’ai taillée jusqu’à ce que, ramenée à une portion congrue, je la perde de vue. C’est ainsi que je me suis perdu.
Je me suis posé les fesses sur le rebord d’un trottoir et comme mes goûts en manière d’aventure sont empreints d’une morale rigide, je ne l’ai pas fait. Je me dis parfois que j’aurais tout de même pu essayer. Mais plus fort encore que la morale: la peur. Au ventre et aux fesses. Cependant pas suffisante pour que, prenant mes jambes à mon cou, je me carapate en Transylvanie.
Du coup j’ai zoné. Sur place, c’est moins fatigant. Avec ce que je buvais, fumais et pensais, je ne me sentais pas d’en faire davantage, parce que, mine de rien, pour arriver quelque part, il faut y aller, donc faire des efforts. De toute façon, j’avais perdu mon chemin.
Restant toujours au même endroit, j’ai fini par m’encroûter. Au sens propre, façon de parler, vu l’aspect peu ragoûtant que visage et mains présentaient. Je ne parle pas du reste, du moins de ce qui me restait qui ressemblât à quelque chose d’humain. Immonde. Je suis devenu immonde et puant: les quidams les plus respectueux de leurs sens (olfactif et visuel) me contournaient en prenant soin de lever les yeux au ciel; les préoccupés butaient sur moi en vomissant injures et déjeuner (ce qui en rajoutait à mon environnement crasseux); les rêveurs utopistes me proposaient un petit travail sans se rendre compte du côté incongru de leur offre; les gamins m’adressaient pierres et quolibets; les bien pensants échangeaient des regards entendus en joignant le geste –index pointant leur tempe et la frappant comme on frappe à l’huis – à la parole –«Si c’est pas malheureux!»–; les chiens de race pissaient au choix sur ma besace éventrée ou sur ma couverture mitée.
Devenu hargneux, vindicatif, agressif et pire, j’ai fini par faire de l’injure, devenue mon occupation principale, mon credo.
Les «Vous avez pas honte» – «Pourriez travailler, au lieu de faire la manche» et autres gentillesses ne m’o…
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«Vous faites quoi, là? Qui vous a donné de quoi écrire? Posez ça tout de suite. C’est quoi qu’vous voulez? Qu’on vous attache comme l’autre fois? Vous voulez vraiment qu’on vous attache encore? Je vous l’ai pourtant déjà dit, ni papier, ni crayon, ni de quoi écrire tant qu’on ne vous le dit pas. Et c’est quoi, ça? Non mais vous vous croyez où? C’est un hôpital ici, pas un club de vacances. Allons allons, soyez raisonnable. Donnez-moi ça tout de suite. Vous voulez quand même pas qu’on vous attache encore? Vous voulez qu’j’appelle les infirmiers, c’est ça? Allez donnez-moi ça, et tout de suite, sinon, les infirmiers plus tout le reste. Vous voulez vraiment vous retrouver attaché, hein, c’est ça? Et le règlement, vous en faites quoi? Oh mais c’est pas compliqué, vous savez…
INFIRMIERS… INFIRMIERS! Récalcitrant. Chambre 16.
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Une unité psychiatrique, quelque part, vraiment n’importe où.
Bien évidemment, la psychiatrie en France n’a rien à voir avec ça. D’accord, avec certains malades, les vrais fous, on est bien obligé de sévir un minimum. C’est qu’ils se croient tout permis, des fois. Il faut savoir qu’avant tout les soignants sont à l’écoute des malades. Bien sûr il y a des traitements et aussi il peut arriver, mais c’est rare, qu’on use de contentions. Pour le bien du malade qu’on se doit de préserver de lui-même. La camisole de force? Vous plaisantez, j’espère? Ces méthodes sont finies depuis longtemps, vous pouvez me croire. Ah, oui oui, vous pouvez me croire.

quelques écrits autour de la psy
Je préférerai me retrouver enfermé avec l’auteur de ce blog, que ce soit en prison, en hôpital psychiatrique ou pourquoi pas dans un bon restaurant plutôt que de me retrouver, ne serait-ce qu’une heure, à partager le même air qu’un André Naline, fut-ce dans une église. Ceci dit, je profiterai de ma présence en un tel lieu tel lieu pour prier que le seigneur, dans sa grâce divine, lui flanque une crise cardiaque.
Qu’est ce qui vous dit que je ne suis pas enfermé?
Comment voulez vous qu’on ne vous ai pas enfermé? C’est à cause de personnes dégoûtantes comme vous que le monde va mal, qu’il y a une crise économique, que j’ai perdu de l’argent à la bourse et qu’il y a plein de MST.
Et moi je serais d’accord pour lancer une pétition qu’on vous enferme car c’est une honte pour la France de laisser des gens comme vous en liberté.