Les infos, les nouvelles relatent des événements, des faits. Elles nous font réfléchir, prendre conscience, réagir, agir ou non, et nourrissent notre mémoire. Ou plutôt la gavent.
Les modèles de bêtise étant bien installés, nous avons une fâcheuse tendance à participer à la reproduction des événements passés les plus dramatiques ou, pire, de mettre en place les paramètres qui permettront aux catastrophes de se rejouer. Nous pourrions apprendre puis retenir les enseignements qu’ils nous délivrent, mais pris dans le tourbillon de ce qui advient (un événement chasse l’autre; une nouvelle s’efface derrière une « première ») nous occultons l’histoire.
«Le temps de prendre connaissance d’une nouvelle elle appartient au passé. On dit aussi « apprendre une nouvelle ». Ce qui suppose qu’on devrait être capable de la restituer dans son intégrité ne serait-ce que pour l’épate, la frime ou le besoin d’informer les ignares.
Pourtant on a généralement vite fait de la reléguer dans un coin discret de la mémoire qu’elle va encombrer avec les précédentes qu’on avait stockées après les avoir étiquetées et classées. Éventuellement.
Dit en raccourci, une nouvelle chasse l’autre. Et peu importe son importance.
Lorsque l’actualité les réactualise (ce qui n’est pas si rare, vu la difficulté qu’on a à se débarrasser des modèles anciens), quelques bribes nous reviennent –vagues détails comptables, par exemple, qui n’ont pas encore réussi à nous échapper, le facteur temps se mêlant à l’affaire– mais dénuées de leur contexte et déconnectées de l’actualité , elles ont perdu le gros de leur sens, pour peu qu’elles en eurent. Ce dont on peut douter.
Pour avoir du sens et prendre sens, une nouvelle –une info, si on préfère– doit être sensée*. Avant de la publier son auteur est censé vérifier ce que ses yeux voient, ce que ses oreilles entendent, mais il est aussi censé tenir compte de la traduction qu’en fait son cerveau (ce n’est pas parce que je vois une étoile que celle-ci existe toujours, et les hurlements de la sirène des pompiers ne sont pas la preuve d’un incendie). Ce qu’il ne fait pas, ne pouvant le faire. Quelle que soit la nouvelle, elle n’est qu’une traduction (parmi d’autres) d’un fait et ne peut au mieux qu’être un des reflets d’une réalité qu’un miroir déformant renvoit. Qu’entend alors l’auditeur, que voit le spectateur, quelle interprétation en fait-il et que va-t-il alors colporter?»
— Mmf… et à quoi tu veux en venir?
— On engrange des nouvelles plus ou moins bidons. Si besoin on s’y réfère alors qu’elles sont souvent loin d’être un exemple d’honnêteté, qu’elles sont tronquées et qu’on les a plus ou moins amalgamées.
Plus j’en apprends, plus ça m’encombre et moins ça me laisse la pensée claire. Non seulement on en est abreuvé, mais ce sont en majorité de mauvaises nouvelles, tout de même plus « vendeuses »: entre les meurtres, les guerres, les catastrophes naturelles, la famine… le stock de drames est loin d’être épuisé et les médias tiennent là un fameux fond de commerce. Que je comprends, faut pas croire…
— Une nouvelle chasse l’autre? C’est ça?
— Le tsunami sur l’Océan indien… Qui en parle encore, hormis ceux qui en vivent directement ou indirectement. Je ne parle pas que du profit financier qui en fait (bien) vivre certains, mais de tous ceux aussi qui y trouvent leur compte (ne serait-ce que celui de pouvoir s’ennorgueillir (parfois à juste titre) de faire de l’humanitaire.
La crise de 2008… « oubliée », avec les belles promesses qui l’ont suivie. Du coup, on remet ça, histoire de ne pas lâcher les bons modèles. Celle d’aujourd’hui n’est pas la même; elle y ressemble, en plus grave.
La grippe H1N1… la fameuse grippe. Qu’en dire? Atchoum!
Haïti… pas tout à fait oubliée, mais en passe de l’être, ou du moins passée au énième plan. Haïti dont on avait « oublié » les épisodes douloureux (rappelons-nous l’époque bénie [par qui? je vous le demande] des tontons macoute).
Les attentats, les tours… infernales un jour ou l’autre, les curés pédophiles, la drogue, le fascisme, les génocides comme ches les Tutsis et Hutus, l’Aghanistan, l’Irak, la Corée du nord, l’Iran, la Thaïlande, le Blennoragistan, Katrina, Xynthia et j’en passe…
— Et ma soeur.
— Quoi, ta soeur?
— Elle vit bien avec toi, si je ne m’abuse…
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* De source sûre, et selon notre correspondant, les supposés pouvoirs auraient…
(Exemple d’un début d’info dénuée de sens)