Alors que j’écrivais mon article du 30 du mois passé, donc juillet, mon texte s’est mis à faire des siennes et s’est pris l’envie, comme ça, sans prévenir, de s’éprendre de liberté. Je ne suis pas contre la liberté, surtout la mienne, et Dieu sait si je milite pour l’asseoir et plus encore pour la dresser debout face aux régimes d’amaigrissement de la pensée, mais de là à laisser mes mots faire ce que bon leur semble, il y a une marge. Marge dans laquelle certains sont d’ailleurs tombés, ça leur apprendra. Et les marges étant à l’extérieur de l’écran, pas question de m’épuiser à essayer d’y repêcher ces mots maladroits avec une gaffe ou une épuisette. Je les ai laissés là où ils ont chu.
Virant ponctuations et espaces entre eux, d’autres mots se sont regroupés avant de me faire face. J’ai pensé un moment tirer dans le lard des plus gras, mais la première ligne s’étant mise en italique, ce qui a eu pour effet de me troubler la vue, j’ai rengainé. De toute façon, mon imbécile d’armurier m’ayant livré n’importe quoi, c’eut été vain. Des munitions à noir alors que j’avais insisté pour qu’elles soient à blanc. Noir sur noir, je n’aurais pu récupérer la moindre bribe de texte.
Ce n’est pas tout, loin s’en faut. Un paragraphe entier s’est permis de se mettre entre parenthèses, tandis que la seule phrase qui l’était s’en est retrouvée dénuée, rendant le texte dénué de sens, alors que je l’avais bel et bien écrit de gauche à droite et de haut en bas, procédé sans lequel le moindre écrit n’a ni queue ni tête.
« Une phrase entière a franchi la frontière nord » m’a prévenu un ami douanier. Pas n’importe quelle frontière, c’eut été trop simple, mais celle du Tüpøtegrathai (Tupeutegrathai ou Tüpötegrathai). Autant dire que je ne suis pas prêt de la récupérer. Et en supposant que j’aie une vague idée de l’endroit où je peux la retrouver, comment la reconnaître si elle a été traduite, et mal traduite, dans une langue étrangère qu’au demeurant plus grand monde ne pratique de nos jours, et encore moins de nos nuits, mis à part ceux dont c’est la langue maternelle ou paternelle si leur mère les a abandonnés lorsqu’ils étaient minots.
Biffant les tirets qui les précèdent, des dialogues ont joué la carte de l’émancipation. Avec ça, allez comprendre qui dit quoi et à qui. Et un tiret de dialogue biffé, je vous laisse imaginer à quoi ça peut ressembler…
Ce n’est pas tout, encore plus loin s’en faut, mais je préfère ne pas en rajouter au cas où d’autres petits rigolos (je parle des mots, phrases, paragraphes qui constituent ce que je suis en train d’écrire) décident de se faire la belle. Alors je vais vite finir.
Bon. Tout ça pour dire que, en ce qui concerne mon article du 30 précédent celui courant, donc du 30 juillet, c’est bel et bien râpé. Si vous l’avez attendu, j’en suis autant marri que désolé. Par ailleurs, et étant donné que ma compassion me porte à m’attrister pour vous, inutile donc de conserver ce masque de douleur que vous feriez mieux de garder pour les grandes occasions. Il y en aura, ne désespérez pas, et il y en a déjà. L’Afrique septentrionale, vous connaissez ? Et le Moyen Orient, ça vous dit quelque chose ?