Je suis mort. Cependant…

Et voilà : je suis mort. Il fallait bien que ça arrive un jour ou l’autre, mais j’aurais préféré l’autre, vu ce que je faisais lorsque ça m’est arrivé. Comme quoi la vie réserve bien des surprises. La mort aussi : être mort n’est déjà pas rien, mais prendre conscience qu’on l’est est bien autre chose, surtout lorsque toute sa vie on s’est persuadé qu’il ne peut rien y avoir d’autre que rien, après qu’on vient de rendre le dernier souffle suite à un repas qu’on ignorait être le dernier. Les fruits de mer daubés, faut faire gaffe, et on ne m’y reprendra plus, promis.
Bref, à cause de certitudes patiemment constuites sur des croyances acquises au fil d’une vie qui vient de se détricoter, me voilà Gros-jean comme devant, plus couillon et transi que l’âne en rut de Marie, que sa virginité ne pouvait laisser de marbre.
Une fois mort, on n’est pas censé savoir qu’on est mort. Mais si on le sait, c’est qu’on n’est pas mort. Et de là à penser que si on n’est pas mort c’est qu’on est vivant, il n’y a qu’un pas. Que je franchis, quoiqu’étant mort.
Je suis mort et vivant en même temps. Le pas que j’ai fait en est la preuve, car on le sait : qu’on les remonte ou pas, les morts n’avancent pas. Contrairement aux aiguilles d’une montre, comptables du temps qui passe.
Je regarde l’horizon. Il m’a toujours été source d’inspiration. Je le fixe. Il ne bouge pas : le temps s’est arrêté, le temps est arrêté comme toujours il le fut. Ce qui me fait comprendre que rien ne sépare ce qui ne peut exister. La vie tout autant que la mort ne sont pas autre chose que le rêve illusoire du grand illusionniste qu’est le temps.

 

A propos pierrevaissiere

On avait réussi à collecter une dizaine de mots qui parlent de l'olibrius qui écrit ces âneries, et voilà, ils se sont échappés. C'est pourtant pas faute de les avoir tenus en laisse.
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